LE REBOND DU MARCHé IMMOBILIER AURAIT DéJà COMMENCé, SELON ROYAL LEPAGE

MONTRÉAL — Les acheteurs sont de retour dans les marchés immobiliers du Québec avant même la prochaine baisse du taux directeur par la Banque du Canada, constate la firme Royal LePage qui révise à la hausse ses prévisions pour l’année 2024.

La vigueur du marché au cours des trois premiers mois de l’année a surpris l’équipe de la firme de courtage. «Les acheteurs sont revenus vers le marché plus tôt que prévu», constate Marc Lefrançois, courtier immobilier chez Royal LePage, en entrevue.

Au premier trimestre, le prix médian d’une maison unifamiliale dans la région du grand Montréal a bondi de 5 %, selon un rapport publié vendredi par Royal LePage.

Les prix suivent la même tendance dans les autres régions du Québec. En trois mois, le prix médian d’une unifamiliale a augmenté de 3,5 % à Québec, de 5,1 % à Gatineau, de 3,4 % à Trois-Rivières et même de 7,4 % à Sherbrooke.

«Initialement, on disait: "quand les taux d'intérêt vont baisser, le marché va reprendre son train d'aller vers le haut", explique M. Lefrançois. À la lumière des données du premier trimestre, c'est clair qu'on voit que le marché a déjà amorcé ça.»

Avec une offre insuffisante d’habitations au Canada, de potentiels acheteurs semblent prêts à revenir dans le marché avant une éventuelle baisse des taux d’intérêt tandis que le souvenir de la flambée des prix et des surenchères reste frais à la mémoire.

L’année 2023 a été plus calme, mais M. Lefrançois a observé un regain d’activité en décembre. Avec la hausse des taux d’intérêt, de nombreux ménages propriétaires ont décidé de repousser le moment où ils achèteraient une maison plus grande.

«Ce segment de marché a commencé à se dire: "OK, les taux vont baisser, je peux prendre du variable. Je vais recommencer à regarder".»

Royal LePage révise donc à la hausse ses prévisions pour l’année 2024. Elle s’attend à ce que le prix des propriétés à la fin de l’année soit 8,5 % plus élevé par rapport à l’an dernier dans la grande région de Montréal. En décembre, elle prévoyait plutôt une hausse de 5 %.

La TD prévoit un printemps plus tempéré

Pour sa part, l’économiste Rishi Sondhi, de la Banque TD, entrevoit un marché plus tempéré que les prévisions de Royal LePage. Il anticipe une «modeste» augmentation des prix au printemps sur le marché canadien.

«De nombreux acheteurs et vendeurs vont probablement attendre d’avoir plus de visibilité sur le moment des prochaines baisses des taux de la Banque du Canada, ce qui mettra le marché dans une forme d’attente», écrit-il dans une note publiée le 8 avril.

M. Sondhi croit aussi que l’hiver plus doux à travers le pays a amené des acheteurs à devancer leurs recherches qu’ils auraient faites un peu plus tard au printemps.

L’économiste concède que le marché est serré au Québec, mais il croit que la détérioration de l’abordabilité vient limiter la capacité du marché de monter trop rapidement.

Peu de solutions de rechange

M. Lefrançois croit que les prévisions des économistes des grandes banques canadiennes ne reflètent pas nécessairement ce qu’il observe sur le terrain. Malgré les taux d’intérêt élevés, la solution de rechange, soit la location, n’est pas si attrayante au moment où les loyers sont également très élevés.

Avec la construction insuffisante, le courtier s’attend à ce que les prix augmentent à moyen terme et que le marché penche à l’avantage des vendeurs.

Il n’anticipe tout de même pas un retour à l’intensité observée durant la pandémie lorsque les taux d’intérêt étaient à un creux et que les locataires ne voulaient plus être confinés dans un petit appartement. Les acheteurs n’auraient pas le même sentiment «d’urgence» de changer d’air, selon lui.

Dans un contexte de hausse de prix, les premiers acheteurs qui ont une mise de fonds suffisante devraient faire leur calcul s’ils décident de repousser leur achat au moment où les taux seront plus bas, suggère M. Lefrançois.

Il donne l’exemple d’un couple qui serait prêt à acheter une maison de 500 000 $ dans le grand Montréal. Pour cette propriété, une augmentation des prix de 8 % en un an représenterait un prix d’achat supplémentaire de 40 000 $.

«Si vous n’êtes pas capable d’épargner ce montant en un an, votre pouvoir d’achat va diminuer, prévient-il. Si vous êtes capables d’épargner beaucoup, la pression pourrait être moins forte si vous attendez, mais si vous n’avez pas un gros taux d’épargne et que vous êtes capable d’acheter quelque chose maintenant, je dirais de foncer.»

Stéphane Rolland, La Presse Canadienne

2024-04-12T07:34:08Z dg43tfdfdgfd